Isabelle Weisz : un objectif pour pinceau

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Isabelle Weisz est une artiste picturale colorée. En découvrant ses clichés, on ressent immédiatement son lien avec la peinture car la photographe utilise son objectif tel un pinceau. Elle marque sur la pellicule des traits de couleurs comme sur une toile. Le rapprochement entre ces deux medias n’est pas fortuit. Depuis 1982, les œuvres de la plasticienne sont exposées dans divers galeries de Jérusalem mais aussi à l’étranger.

Quel parcours avez-vous suivi pour arriver à la photo comme moyen d’expression?

Isabelle Weisz : Il a été long. En France, je travaillais comme psychologue tout en peignant. A partir de 1972, date de mon arrivée en Israël, j’ai organisé des ateliers de peinture pour enfants parallèlement à mon activité artistique. Mais je commençais à étouffer dans mon 3e sous-sol. J’éprouvais le besoin de sortir. Je trouvais l’extérieur intéressant. En 1996, alors que mon fils effectuait sa période de réserve à Hébron, j’ai eu envie de capter l’environnement, comme un coup de pinceau. Puis à Acre, j’ai découvert différentes couches d’images superposées. Cela m’interpellait. Mais c’est vraiment l’Intifada des années 2000 qui m’a motivé à poursuivre dans cette voie. J’ai ressenti la violence, la brutalité que j’ai saisie dans mes images.

En quoi votre art est-il spécifique ?

I. W. : Je vois des choses que personne ne voit car les gens n’ont pas le recul nécessaire. C’est comme si les photos se faisaient toutes seules. D’un certain point de vue, elles s’imposent à moi. Je lie peinture et photographie par les couleurs et les mises en forme.

Est-ce voulu l’aspect non figuratif de vos images qui rappelle la peinture abstraite ?

I. W. : Non mais la peinture abstraite ressort dans mes clichés. Peut-être que mes photos l’ont un peu transformée mais en gros, elles reflètent ma peinture habituelle.

Comment trouvez-vous vos inspirations ?

I. W. : Je me promène dans les rues de Hébron et d’Acre d’où se créé un processus qui attire l’œil. Je fonctionne selon l’inspiration du moment, sans idée préconçue.

Qu’exprimez-vous à travers vos clichés ?

I. W. : Les relations entre Juifs et Arabes. Cette lutte me pousse à photographier.

Quelle part de vous-même transparait dans vos photos ?

I. W. : La plus colorée, la plus picturale. Mes images sont très personnelles. Elles reflètent le style que j’ai voulu, comme une lutte à coup de pinceau. Je cherche à intégrer la photo à la peinture des murs de la ville.

Comment vos images captent-elle la réalité israélienne ?

I. W. : De façon brutale. Mes épreuves représentent la dynamique violente de la réalité israélienne. Elles décrivent cette factualité et y accèdent comme des coups de pinceau qui se disputent les uns les autres.

Quel rapport entretenez-vous avec le judaïsme, Israël et l’art ?

I. W. : Ils forment un tout. Je vois le judaïsme comme une plasticité : la photo figure la violence d’expression sans abîmer le côté plastique de la réalité. L’art reflète les aspects picturaux, les mélanges plastiques entre judéité et expression.

Comment vous définissez-vous ?

I. W. : Je ne me sens pas vraiment une artiste engagée. Je suis plutôt une plasticienne.

Votre création artistique vous aide-t-elle à surmonter la maladie ?

I. W. : Pas du tout. Je reste sur le plan plastique, descriptif.

Quel message transmettez-vous au public et comment réagit-t-il ?

I. W. : La plasticité aide à faire passer la réalité. Lors d’expositions ou de film sur mon travail, le public israélien, francophone comme étranger réagit positivement, se dit beaucoup touché.

Avez-vous d’autres projets en attente ?

I. W. : Bien sûr. J’espère continuer dans ce qui me satisfait.

Noémie Grynberg 2011