France-Israel : je t’aime, moi aussi

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Depuis peu, les francophones d’Israël semblent avoir pris une nouvelle dimension aux yeux de la France. Jusque là n’étant qu’une petite communauté de l’étranger, ils paraissent aujourd’hui revêtir un regain d’intérêt. Pourquoi ce revirement ? Une congruence de facteurs peut expliquer ce nouveau phénomène.

En France

Premièrement, on pense à l’effet Sarkozy. Le nouveau Président français, tout au long de sa campagne présidentielle insistait sur son lien particulier avec la communauté juive, en rappelant ses propres origines hébraïques de Salonique. Il a mainte fois exprimé sa solidarité, sa communion de pensé avec les Juifs de France. Il a insisté sur sa compréhension quant à leur préoccupations face aux problèmes de racisme, d’antisémitisme, d’anti-israélisme dont ils sont victimes. Devenu président, Sarkozy a insisté pour se rendre personnellement en Israël, pour afficher sa proximité avec le pays, ses habitants et sa communauté francophone.

Deuxièmement, les émeutes de fin 2005 ont fait prendre conscience de ce qui couvait depuis des décennies mais que la gauche occultait systématiquement : le problème d’intégration de la population maghrébine. Devant ce constat d’échec de l’idéal républicain français, certains se sont interrogés sur le pourquoi de ce revers alors que d’autres communautés se sont parfaitement intégrées et ont réussi leur naturalisation. Parmi les exemples positifs et probants, celui des Juifs dont la contribution à toutes les strates de la société a été considérable. Peut-être que par comparaison, les autorités françaises ont compris l’immense fossé qui sépare la communauté juive intégrée et contribuant au bien-être de leur pays avec la communauté maghrébine dont la jeunesse semble rejeter les valeurs citoyennes démocratiques et républicaines.

Troisièmement, le bicentenaire du Consistoire central instauré par Napoléon a prouvé aux autorités françaises que l’intégration d’une communauté religieuse différente pouvait réussir. Les Juifs de France ont démontré leur esprit républicain, leur attachement et leur loyauté à leur nouvelle citoyenneté (malgré les vicissitudes de l’Histoire) et leur respect des lois de la République tout en conservant dans la sphère privée, à titre individuel, leur attachement communautaire et spirituel aux lois de Moise et au peuple d’Israël.

Quatrièmement, les répercussions terribles des années d’Intifada qui ont opposé les communautés juive et musulmane de France ont entraîné une remise en cause profonde des Juifs de France. Non seulement ces derniers ont subi injustement discrimination, critiques, violences verbales et physiques mais en plus ils ont ressenti un rejet, comme s’ils n’appartenaient plus à part entière à l’Hexagone, comme s’ils n’étaient plus vraiment des citoyens français. Ce sentiment d’exclusion a provoqué une vague d’immigration vers Israël. Les autorités françaises ont pris alors conscience de l’ampleur du phénomène et l’ont ressenti comme une émigration de masse. Elles se sont rendu compte du potentiel humain qui quittait la France : des professions libérales, des jeunes, des diplômés, etc. Une partie des forces vives de la France semblaient fuir ce pays où elles ne se sentaient plus à leur place, plus le bienvenues.

Ainsi, la France voyant une partie de ses ressortissants juifs quitter le pays pour Israël s’est peut-être enfin posée les bonnes questions. Peut-être qu’après 60 ans de désintéressement des francophones d’Israël, elle a enfin compris l’intérêt de cette population, des liens culturels, académiques ou économiques qu’elle représentait.

La France qui rêve de rayonner culturellement au Moyen-Orient par le vecteur de la francophonie trouve sans doute enfin auprès des Français d’Israël un relais actif et dynamique.

En Israël

De leur côté, les francophones d’Israël semblent avoir appris à gérer le monde associatif. Deux associations représentent actuellement les intérêts des Français d’Israël en France : l’Union des Français de l’Etranger et l’Union Démocratique des Français de l’Etranger. De façon plus organisée, les Français d’Israël peuvent ainsi faire valoir leur droits.

Deuxièmement, cela est peut-être aussi dû au changement idéologique opéré en Israël. Alors que l’idéal pionnier était pour une intégration totale dans le creuset national, aujourd’hui on constate un tournant vers une société plus multiculturelle c’est-à-dire une intégration au sein de sa propre communauté culturelle et linguistique. Ainsi, le sentiment de double appartenance a pu être renforcé et donc un lien avec la France maintenu plus étroitement.

 

Noémie Grynberg 2008